Le vendredi, 26 octobre 2018
Au sujet de politiciens qui sont les amis de criminels au pouvoir
(Auteur du livre « Le
nouvel empire américain », du
livre « Le
Code pour une éthique globale » et de son récent livre « La
régression tranquille du Québec, 1980-2018 »)
« Malheureusement,
l'idée d'un autocrate bienveillant, le dictateur juste, est en train de
renaître dans le monde arabe. »
Jamal
Khashoggi (1958-2018), journaliste saoudien, résident
permanent des États-Unis et chroniqueur du Washington Post Global Opinions,
assassiné par le gouvernement saoudien de Mohammed ben Salmane (1985-), à
Istanbul, en Turquie, le mardi, 2 octobre 2018. (Dans un discours prononcé lors
d'une conférence organisée en avril 2018 par le Centre for Middle East Studies
de l'Université de Denver et le Centre pour l'étude de l'islam et de la
démocratie, à Washington, DC).
« Ils
[les Saoudiens] avaient un très mauvais
concept original, et ils l’ont mal exécuté et la dissimulation a été l'une des
pires de l'histoire de la dissimulation. (…)
C’est
très simple ; ce fut un mauvais projet. Il n'aurait jamais dû être
envisagé. Quelqu'un s’est vraiment fourvoyé. Et ils ont eu la pire couverture
de tous les temps. Le moment où ils auraient dû mettre un frein à toute
l’affaire, c'est dès le début.
Quiconque
a pensé à cette idée [d'assassiner le journaliste saoudien
Jamal Khashoggi] est, je pense, en grande
difficulté, et ils devraient l'être. »
Donald
Trump (1946-), président américain en poste,
(déclaration faite aux journalistes le mardi 23 octobre 2018 à la Maison
blanche)
« Quand
des hommes méchants se liguent entre eux, les gens bien doivent s'associer;
sinon, ils tomberont l’un après l’autre, dans un sacrifice impitoyable et une
lutte méprisable. »
Edmund
Burke (1729-1797), homme d'État irlandais, auteur,
orateur, théoricien politique et philosophe.
En
tant qu’homme politique, Donald Trump est à l'image du gouvernement américain,
lequel doit veiller au maintien du complexe militaro-industriel américain. Il lui faut des « ennemis ». En effet,
Donald Trump semble avoir besoin d’« ennemis » pour établir sa propre
identité politique et, éventuellement, pour détourner l’attention de ses
propres défauts. Il n’a donc pas des « adversaires », mais des
« ennemis », qu’il qualifie d’être des « ennemis
du peuple ».
Ce n’est pas là une mince affaire car il s’agit
d’un langage totalitaire. En effet, des dictateurs et des démagogues violents,
oppressifs et fascistes ont, dans le passé, utilisé cette épithète. On pense,
entre autres, à Adolf Hitler (1889-1945) dans l’Allemagne nazie, à Vladimir
Lenin (1870-1924) et à Joseph Staline. (1878-1953) dans l’ancienne URSS. Leur
objectif: attiser
la haine politique et délégitimer leurs “ennemis” et tous
ceux qui osaient critiquer leurs gouvernements totalitaires. Remarquez qu’il
s’agissait de dictateurs authentiques. Le fait que Donald Trump utilise avec
désinvolture un rhétorique
politique violente pour
délégitimer ses opposants devrait être une source d’inquiétude pour tous ceux
qui valorisent la démocratie.
Dans
le passé, Donald Trump a qualifié la candidate démocrate à la présidence,
Hillary Clinton, d ‘« ennemie », allant même jusqu'à l’accuser d’être
corrompue, sans apporter la moindre preuve pour appuyer une telle accusation.
Il a également qualifié les
médias et les journalistes d’être des « ennemis ». Il les qualifie de
« faux médias ». Il a souvent attaqué des athlètes et des stars d’Hollywood
de la même manière, et il en a insulté des dizaines d’autres. Trump
continue de bousculer tout le monde, y compris le président
de la Fed. Ce dernier aurait pu lui répliquer, poliment il va sans
dire, que ses politiques économiques imprudentes et pro-cycliques
sont motivées par des considérations essentiellement politiques et sont
contraires à une bonne gestion économique.
Que
le politicien Donald Trump puisse s’en
tirer avec un comportement aussi provocateur et incohérent que le sien
est vraiment surprenant. Aux Nations Unies, en septembre, on s’est ouvertement moqué de lui. En effet, Trump est
devenu une source de dérision et de peur dans le monde entier. C’est peut-être
une chose que ses partisans aveugles ne voient pas, mais le monde, lui, le
voit.
Dans une véritable démocratie, les politiciens
ne visent pas le pouvoir absolu pour eux-mêmes ou leur famille, et ils ne
considèrent pas ceux et celles qui se portent candidats dans des élections
libres comme des « ennemis », mais comme des opposants légitimes.
Traiter publiquement des adversaires politiques qui ont des programmes
politiques différents d’«ennemis» est un langage de dictateurs et d’autocrates.
D'autre part, le président étasunien Donald
Trump semble avoir un penchant, sinon une admiration évidente, pour les
autocrates et les dirigeants
totalitaires d’autres pays. Par exemple, il a déclaré
être un admirateur de Xi Jinping, le président à vie de la Chine communiste,
allant même jusqu’à dire, sur le ton de la plaisanterie, que c’était « formidable » et que « peut-être devrions-nous essayer ce système, un
de ces jours ! » Donald Trump s’est également
montré fort à l’aise avec le
dictateur nord-coréen, Kim Jung-un, avec l’autocrate turc Recep Tayyip Erdogan,
avec le dictateur philippin en puissance Rodrigo Duterte et avec d’autres
autocrates ou tyrans du même acabit, tout en fermant les yeux sur leurs actes
de brutalité et d’oppression. C’est un comportement qui étonne car c’est un
retour aux années trente, quand plusieurs démocraties furent remplacées par des
dictatures.
Les
relations privilégiées de Donald Trump avec le régime meurtrier de l’Arabie
saoudite du prince Mohammed ben Salmane
Cependant, cela n’est rien en comparaison
des efforts qu’a déployés Donald Trump pour se porter à la défense du
gouvernement saoudien et pour dissimuler l’assassinat et le démembrement (avec
une scie à os) du journaliste résident américain, Jamal Khashoggi. On sait que
ce crime odieux a été commis le 2 octobre 2018 par un commando saoudien de 15
tueurs, à l’intérieur du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, en Turquie.
Dans un premier temps, Trump a déclaré avoir parlé au prince Mohammed ben Salmane et que ce
dernier l’avait assuré qu’il « n’avait
pas donné l’ordre » d’assassiner le journaliste Khashoggi, même si certains
des assassins venaient de son entourage immédiat et étaient ses gardes du corps. Par la suite, Trump
a renchéri en déclarant publiquement qu’il « croyait le démenti » de ben Salmane, comme si un présumé
assassin allait admettre un crime aussi barbare !
Quand le gouvernement saoudien
inventa le scénario farfelu selon lequel le journaliste serait mort lors d'un
« combat à mains nues »
avec le commando de 15 personnes venu expressément d’Arabie saoudite pour
l’assassiner, Donald Trump déclara que les prétentions saoudiennes étaient
« crédibles », alors même
que le monde entier tournait toute l’affaire en dérision. En effet, il défie la
logique et le bon sens que dans un État religieux totalitaire comme l’Arabie
saoudite, des agents du gouvernement se chargeraient d’assassiner et de
démembrer un critique connu du régime, et ce, dans un pays étranger, sans avoir
reçu un ordre explicite pour ce faire de la part d’un très haut placé.
Cependant, quand on annonça qu’on
avait retrouvé les restes du corps du journaliste démembré dans
le jardin de la résidence du consul général
saoudien à Istanbul, et que le gouvernement turc déclara qu'il avait des
preuves que l'assassinat de Khashoggi à l'intérieur du consulat saoudien avait
été prémédité et soigneusement planifié, et que « de la personne qui a donné l'ordre jusqu’à la personne qui l'a exécuté,
tous devraient être traduits en justice », les efforts de Donald Trump pour
camoufler le crime du gouvernement de ben Salmane devinrent intenables.
C’est alors que Trump fit la
remarque que l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul
avait été « un mauvais projet »
et que « quelqu'un s’est vraiment
fourvoyé ». Il a par la suite annoncé quelques « sanctions »
de nature cosmétique contre les membres du commando d'assassins, mais sans
aucunement faire référence aux hauts responsables saoudiens qui ont ordonné le
meurtre et surtout sans impliquer le responsable présumé, Mohammed ben Salmane.
Dans toute cette affaire, Donald Trump a semblé
mettre l'accent sur la façon dont les Saoudiens ont « bâclé »
l’assassinat, non pas qu'ils l’aient, au départ, « commis ». Certains
disent que Donald Trump est un individu amoral et immoral, qu’il n’a aucune
éthique personnelle et qu’il est incapable, dans n’importe laquelle situation,
de distinguer le bien du mal. Ceci pourrait en être un exemple frappant.
Conclusion
Au fil des jours et alors que le président
Donald Trump va de crise en crise, mon appréciation de l’homme dès
le premier jour tient toujours, à savoir que l’impérieux
homme d’affaires devenu président des États-Unis est « une menace pour la démocratie américaine et
un facteur de chaos pour le monde ».
________________________________________
Le Prof. Rodrigue Tremblay est professeur émérite d’économie à l’Université de
Montréal.
On peut le
contacter à l’adresse suivante : rodrigue.tremblay1@gmail.com.
Il est l’auteur
du livre du livre « Le nouvel empire américain » et du livre « Le Code pour une éthique globale »,
de même que de son dernier livre publié par les Éditions Fides et intitulé
« La régression tranquille du Québec, 1980-2018 ».
Site Internet de l'auteur : http://rodriguetremblay.blogspot.com/
Prière
de faire suivre l’article :
rodriguetremblay.blogspot.com
***Pour s'enregistrer et recevoir les articles par courriel,
écrire « souscrire » à carole.jean1@yahoo.ca
***Pour s'enregistrer et recevoir les articles par courriel,
écrire « souscrire » à carole.jean1@yahoo.ca
Mis en ligne, le vendredi, 26 octobre 2018.
____________________________________________
© 2018 Prof.
Rodrigue Tremblay