Rodrigue Tremblay au lancement du
livre «La régression
tranquille du Québec, 1980-2018»
le 12 septembre 2018. Photo
par Micheline Ladouceur pour Mondialisation.ca
Il Faut Arrêter la Régression Tranquille du Québec
Par Rodrigue
Tremblay, professeur émérite de l’Université de Montréal et auteur du récent
livre « La régression tranquille du Québec, 1980-2018 », 2018,
publié chez Fides, 344 p.
La régression tranquille du Québec que l’on observe présentement n’est pas dans tous les domaines. Loin de là. Dans le domaine économique, par exemple, même si le Québec a perdu d’importants sièges sociaux ces dernières années, l’ingéniosité québécoise est encore fortement au rendez-vous, et cela même si le protectionnisme commercial américain est présentement une source de préoccupation.
C’est un fait
que les villes de Montréal et de Québec, en particulier, sont devenus des
centres mondiaux d’innovation et des plaques tournantes dans des domaines d’avenir,
tels que ceux de la haute technologie, de l’intelligence artificielle et de l’électronique.
Le Québec se distingue aussi par ses avancés dans les domaines de la pharmacologie,
de la biochimie, de l’aérospatiale et des télécommunications. Il en va de même dans le monde artistique
et universitaire, domaines dans lesquels le Québec s’est taillée une réputation
internationale. Avec ses quatre universités, Montréal est un centre d’attrait
important pour les entreprises qui recherchent des spécialistes dans de
multiples domaines de l’économie du savoir.
Non. C’est avant
tout dans les domaines politique, constitutionnel, démographique et
linguistique que le Québec est en recul et risque son avenir. C’est dire que le
recul du Québec est davantage dans ce que l’on peut appeler « l’être » que dans domaine restreint
de « l’avoir », c’est-à-dire
davantage une question d’identité que de richesse.
On sent, néanmoins,
un essoufflement certain dans les progrès importants que le Québec a fait dans
la foulée de la Révolution tranquille, dont l’épicentre s’est situé dans les décennies
de 1960 et de 1970. Des retards importants sont, en effet, apparus dans les
investissements de remplacement en éducation, en santé et en infrastructures de
base. De tels retards ne sont pas inéluctables et une vision appropriée des
besoins de l’avenir permettrait sans doute d’y remédier.
La morosité palpable que l’on ressent aujourd’hui est
avant tout causée par les importants reculs que le Québec a connu, au cours des
40 dernières années, concernant son autonomie politique, constitutionnelle,
social, culturel et linguistique. À un tel point, que la dérive observée dans
ces domaines clé pourrait menacer, à terme, si un redressement n’est pas au
rendez-vous, la survie même de la seule société majoritairement francophone en
Amérique du Nord, soit celle du Québec.
En 1982, suite à
un coup de force constitutionnel illégitime et inacceptable de la part du
gouvernement fédéral de Pierre Elliott Trudeau, le Québec a été ramené de son
statut de foyer d’un des deux peuples fondateurs du Canada et de l’une des
quatre provinces fondatrices de la Confédération canadienne, en 1967, à celui
des provinces anglophones. Et, pour certains politiciens, l’État du Québec de
Jean Lesage est redevenu la « province
de Québec », selon la définition romaine du terme « province », laquelle signifie « territoire conquis ».
Il est bon de rappeler que le Québec, au cours de
bientôt cinq siècles, a toujours été l’épicentre de la grande épopée
francophone en Amérique du Nord, malgré les grandes régressions que les
francophones vécurent entre 1760 et 1774 et entre 1840 et 1867. Si cet arbre
allait s’étioler, s’affaiblir ou même péricliter, les branches acadienne et
canadienne française de la francophonie ne pourraient pas survivre bien
longtemps.
Dans le livre
que je viens de publier aux Éditions Fides, j’identifie un certain nombre de
mesures et d’initiatives à considérer pour permettre au Québec de reprendre l’offensive
et pour empêcher qu’un tel désastre ne se produise. J’en énumère ici
quelques-unes :
- Éviter d’éparpiller
et de marginaliser les forces politiques francophones et, au besoin, modifier
le mode de scrutin tout en conservant l’objectif de la stabilité politique.
- Rétablir l’État du Québec en
tant que levier politique indispensable pour le progrès, notamment en matière économique.
- Résister
par divers moyens au fédéralisme unitaire, autoritaire et
centralisateur, tel qu’imposé par la Loi
constitutionnelle de 1982, sans l’accord du Québec.
- Renverser la dérive
démographique, laquelle fait courir de grands risques au Québec, par des
politiques appropriées.
- Obtenir plus d’autonomie
pour le gouvernement du Québec eu égard à une politique articulée d’intégration
linguistique, culturelle et économique des immigrants sur son territoire…etc.
Conclusion
Il est important de croire dans l’avenir parce que les
Québécois et les Québécoises sont capables de grandes choses, pourvu qu’ils le
veuillent.
En effet, quand tout a été dit, tout revient à la
question centrale, à laquelle chacun et chacune a le devoir de répondre :
« Est-ce
que les Québécois et Québécoises d’aujourd’hui, en tant que patriotes de toutes
origines, ont la volonté de travailler à la survie, à l’épanouissement et à la
prospérité de la seule nation francophone majoritaire en Amérique du Nord ? »
____________________________________________________________________
Rodrigue Tremblay
auteur du livre « La régression tranquille du Québec,
1980-2018 », Montréal, Fides, 2018, 344 pages.
Disponible dans toutes les
librairies du Québec
chez Les éditions FIDES:
514-745-4290
ISBN : 978-2-7621-4218-1
en ligne sur Renaud-Bray, Amazon, Chapters, etc.
__________________________________________________________
©
Rodrigue Tremblay, Université de Montréal